Catéchèse: transmission, musique et silence

Transmission, musique et silence
Recentrer notre foi et notre dévotion

————– Michel GAZON

Les défis de notre Eglise Protestante Réformée concernant la musique et son impact sur les jeunes peuvent, me semble-t-il, être abordés sous trois angles : leur réception de la musique dans l’église, leur pratique personnelle, et des pistes pour une meilleure participation. Je ne prétends pas être exhaustif, c’est impossible, et encore bien moins universel dans mes propos, mais me concentrerai sur les églises protestantes belges que je connais en partie.

De la réception de la musique chez les jeunes : Les jeunes générations peuvent trouver les hymnes et cantiques traditionnels peu adaptés à leurs goûts et à leur culture musicale contemporaine. La musique d’église est parfois perçue comme déconnectée de leurs préoccupations ou de leur langage musical. Cependant, je connais des églises où les jeunes acceptent les chants d’assemblée accompagnés à l’orgue pendant le culte et se réjouissent d’un accompagnement, par exemple, à la guitare, lors des réunions du groupe de jeunes. Je dirais qu’ils font la part des choses. D’un autre côté, je pense que la redécouverte du silence (voir plus loin dans le texte) est aussi primordiale pour la communauté entière, pas seulement les jeunes, car nous sommes baignés toute la journée dans tellement de bruit, intérieur ou extérieure.

De la pratique personnelle de la musique : Certains jeunes peuvent avoir du mal à s’investir dans des activités musicales d’église en raison d’autres activités, d’un manque de confiance en leurs compétences ou du peu d’opportunités de participation active. Si les jeunes pratiquent déjà de la musique en dehors de l’église, il peut y avoir un manque de connexion entre leur pratique musicale personnelle et la spiritualité ou les valeurs de l’Église. L’absence de ressources ou de formations pour aider les jeunes à s’impliquer dans la musique liturgique peut limiter leur engagement.

Pistes pour une meilleure participation : Une programmation musicale variée peut attirer un plus large éventail de sensibilités. Mais est-ce une priorité pour renflouer coûte que coûte la présence de nos jeunes ? Je pense que l’écoute est essentielle. Offrir des espaces pour que les jeunes puissent composer, interpréter, et choisir des morceaux en fonction de leurs goûts, tout en restant ancrés dans les messages de l’Évangile est important. De même, la création de groupes ou chorales qui rassemblent différentes générations, favoriseront à coup sûr le dialogue et la compréhension mutuelle à travers la musique.
Proposer des ateliers et formations afin d’offrir des cours ou stages de chant, d’instrument, ou de composition musicale dans un cadre chrétien pour permettre aux jeunes de s’approprier la musique liturgique. La valorisation de nos jeunes est primordiale : donner des responsabilités aux jeunes dans l’animation musicale des cultes (direction chorale, instruments, mixage son, …) pour qu’ils se sentent valorisés et partie prenante de la vie ecclésiale, mais la condition essentielle est évidemment d’avoir des jeunes musiciens ou bons chanteurs dans l’église. Il est important, à la fois, d’ouvrir l’horizon musical de l’église, de valoriser la créativité des jeunes, et de chercher un équilibre entre tradition et modernité.

Piste pour recentrer notre foi et notre dévotion : le « silence »
Le monde intérieur et extérieur dans lequel nous « sommes » est en permanence rempli de bruits et d’interférences. Il est urgent pour la jeune génération et aussi pour la moins jeune de redécouvrir la perle qu’est le silence, en nous et devant Sa Présence. Le silence est un élément très précieux dans la vie chrétienne, en particulier dans la liturgie et la transmission de la foi. Alors que la musique est souvent un moyen puissant d’expression et de communication, le silence occupe une place complémentaire et essentielle dans notre relation avec Dieu. Il est un espace dans lequel nous pouvons entendre Sa voix, réfléchir, méditer, et parfois même nous reposer dans Sa présence. Il n’est pas l’absence de musique ou de parole, mais un espace sacré qui permet à l’âme de se recentrer et de recevoir.
Je pense que ce silence est malheureusement aujourd’hui anxiogène pour la plupart de nos contemporains et surtout pour nos jeunes, tout le contraire de ce qu’il devrait être. Mais il n’est jamais trop tard pour apprendre ou réapprendre à faire silence devant Dieu.

Psaume 46:10 : “Arrêtez, et sachez que je suis Dieu.”
Ce verset invite à la pause, à l’arrêt, au silence, pour reconnaître la souveraineté de Dieu et se tourner vers Lui dans une attitude d’humilité et de réceptivité. Le silence devient alors un acte de foi.

Habacuc 2:20 : “Le Seigneur est dans son saint temple. Que toute la terre fasse silence devant lui.”
Ici le silence est aussi une réponse de révérence devant la grandeur et la sainteté de Dieu. Lorsque nous nous trouvons devant Dieu dans Sa majesté, nous sommes invités à nous taire et à laisser place à Son autorité (acceptation du « tout-autre) divine. Des dizaines de passages bibliques en parlent ! A l’opposé d’être une attitude passive, le silence est un recentrage important vers l’essentiel : « Sa Présence ». C’est donc une action qui demande du temps et pour laquelle un entraînement est nécessaire, tout comme les sportifs de haut niveau visant l’excellence, mais non dans un but de gloire ou de résultats personnels, mais plutôt de profondeur dans la découverte de la Présence divine aimante et offerte gratuitement, pour toujours. Il ne s’agit pas d’introspection ni de méditation de « pleine conscience », mais plutôt d’un abandon en pleine confiance.
Si nous avons une chose à transmettre à la jeune génération, c’est celle-là, parce qu’un jeune pouvant faire silence devant Dieu est un musicien dans l’âme, un véritable artiste en herbe dans le jardin de Dieu. C’est de cela, vraiment, que notre monde a le plus besoin. Nous pouvons tous compter sur le Maître du Silence, Jésus-Christ, Insurpassable, même si nous sommes tous appelés à surpasser tous maîtres terrestres, mais Lui est l’étoile à suivre.

Crédit photo: La musique du silence | Bande- – La musique du silence – Apple Podcasts  

Crédit du texte : Michel GAZON a 59 ans et est père de Zoé (24 ans). Ingénieur de formation, il travaille près de 30 ans dans une importante société gazière multinationale ainsi que comme chargé de cours à IFOSUP (Wavre). Il démarre un cursus en théologie protestante en 2019. Après deux années de suffragance à LLN (EPUB), il est actuellement proposant à Marchienne (EPUB). Son parcours musical est varié, touchant à plusieurs instruments (guitares, violoncelle, contrebasse, saxophone, flûte irlandaise, percussions, …) et aussi dans le chant en chorale, il est fan des musiques baroque, traditionnelle et celtique en particulier. Depuis de nombreuses années, il conduit l’accompagnement musical en église et dans des milieux chrétiens très variés, seul ou en groupes.
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