Chemin de Croix

Quand on n’en peut plus d’entendre et de voir les souffrances d’un peuple attaqué lâchement. Quand on a n’a qu’une seule envie, c’est de se prendre la tête dans les mains.

Quand le cœur déborde d’une profonde et vraie tristesse fraternelle.

Quand on voudrait crier d’impuissance, de rage, de colère.

Quand on est tenté de baisser les bras face à une folie humaine qui semble sans limite.

Quand malgré tout on agit, on réagit, on se veut solidaire, petitement, modestement, mais qu’on voudrait entreprendre tellement plus…

Quand.

Quand.

Quand…

 

Alors il est temps de se tourner vers la source qui alimente notre foi, soutient notre vie et alimente notre action : notre Maître, notre Rabbi, comme disaient affectueusement et respectueusement ses disciples.

Il a connu les attaques violentes, le rejet, la médisance, les critiques, les diatribes, l’incompréhension, la faim, la soif, la fatigue, la torture et finalement une mort infâmante sur une croix (ou un poteau, comme vous voulez), supplice réservé aux comploteurs contre l’empereur et aux ennemis de l’empire romain, victime innocente de dénonciations fausses et calomnieuses.

Il peut comprendre.

Il est là.

Au milieu des ruines, dans le vacarme de la guerre.

Il saigne dans les hôpitaux détruits.

Il tient par la main les écoliers bombardés, les enfants arrêtés de manière ignoble.

Il assiste les femmes qui accouchent sous les bombes.

Il accompagne les réfugiés harassés sur les routes.

Il soutient les vieillards immobilisés par l’âge, le handicap, la maladie, la peur, le dénuement.

Et il regarde droit dans les yeux, sans faiblir, celui et ceux qui provoquent de tels ravages.

Et il leur demande : qu’as-tu fait de ton frère ?

 

On pourrait s’arrêter à ce chemin de croix contemporain. On pourrait se contenter de tomber et se relever à chaque fois.

On pourrait rester prostré au pied de la croix, tétanisé par son échec apparent.

On pourrait s’en aller la tête basse et rentrer chez soi se terrer.

 

Jésus se trouve sur notre chemin d’Emmaüs. Il prononce des paroles percutantes et bouleversantes.

Il nous pousse dans le dos et nous retourne nos questions :

Quand auras-tu assez de foi pour cesser de désespérer ?

Quand te mettras-tu en route pour agir ?

Quand seras-tu encore plus engagé.e pour la justice, la paix, la fraternité dans le monde ?

Quand mettras-tu en pratique le message que tu as peut-être entendu depuis ta jeunesse ?

Quand cesseras-tu de t’arrêter à vendredi saint en oubliant la lumière fulgurante du matin de Pâques ?

Quand, de mort que tu es, reviendras-tu à la Vie ?

 

En ce temps de la Passion, souffrance et amour fou, que le Seigneur nous vienne en aide, nous ouvre les yeux et le cœur à la foi et la confiance, à la certitude de la pérennité de Son amour plus fort que la mort.

 

Yvette Vanescotte

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