Dieu était dans le souffle du vent

Méditation à deux voix sur la Pentecôte

– Il est drôle, Dieu ! – Ah oui ? Drôle ? Pourquoi ? – Beh, on ne sait jamais comment Il se manifeste, Il invente toujours de nouvelles manières pour se tenir au milieu de nous !

Tiens, par exemple, dans le Premier Livres des Rois, dans le Premier Testament, je lisais l’autre jour qu’Élie, le prophète, était au mont Horeb, et voilà que Dieu lui parle : « Que fais-tu ici, Elie ? » Déjà, comme si Dieu ne le savait pas, hein ! « Sors et tiens-toi dans la montagne, devant le SEIGNEUR. » Or le SEIGNEUR passait. Un grand vent, violent, arrachait les montagnes et brisait les rochers devant le SEIGNEUR : le SEIGNEUR n’était pas dans le vent. Après le vent, ce fut un tremblement de terre : le SEIGNEUR n’était pas dans le tremblement de terre. Après le tremblement de terre, un feu : le SEIGNEUR n’était pas dans le feu.

Enfin, après le feu, un calme, une voix ténue. Quand Elie l’entendit, il s’enveloppa le visage de son manteau, sortit et se tint à l’entrée de la grotte. Et soudain la voix lui dit [encore une fois] : « Que fais-tu ici, Elie ? » (1R19.9-13)

Et puis, dans notre passage du Livre des Actes des Apôtres, il y a un grand bruit comme un vent violent et puis des langues pareilles à des flammes de feu, et c’est ainsi que Dieu se manifeste ! Il y a de quoi être troublé(es), non ?

– Mh… Moi ce qui me trouble effectivement, c’est cette histoire de langues de feu… Jésus n’avait jamais parlé de ça, non ?

– Il y a quand même les paroles de Jean-Baptiste, rapportées par les évangélistes, avec Le baptiseur qui dit aux foules en parlant de Jésus : « Moi, je vous baptise dans l’eau, pour un changement radical ; mais celui qui vient derrière moi est plus puissant que moi, et ce serait encore trop d’honneur pour moi que de lui ôter ses sandales. Lui vous baptisera dans l’Esprit saint et le feu. » Et il ajoute : « Il a sa fourche à la main, il nettoiera son aire, il recueillera son blé dans la grange, mais il brûlera la paille dans un feu qui ne s’éteint pas. » (Mt3.11-12) Donc dès le début du Nouveau Testament, on est quand même prévenus… Et puis, ben, c’est comme dans la chanson, on y pense puis on oublie !

– Oui, maintenant que tu le dis… C’est vrai aussi, puisque nous sommes dans une joute de versets bibliques, que Luc fait l’écho d’une parole de Jésus qui pourrait paraître dure à première vue : « Je suis venu mettre un feu sur la terre ; comme je voudrais qu’il soit déjà allumé ! J’ai un baptême à recevoir ; comme cela me pèse d’ici qu’il soit accompli ! » (Luc 12.49-50) Si nous lisons ce verset comme ça, isolément, cela semble destructeur : « Je suis venu mettre le feu sur la terre » ! Mais si nous relisons ce verset à la lumière de la première Pentecôte qui a suivit la Résurrection, ces mots prennent un sens nouveau, bien plus positif ! A. Oui, et ça nous aide aussi à comprendre l’un des deux sacrements de notre protestantisme réformé, le sacrement du baptême !

– Mais, le baptême, c’est avec de l’eau !

– 😊 Et dans deux minutes vous allez tous me dire que l’eau éteint le feu, je vous vois venir ! Pour moi, aujourd’hui tout particulièrement, ce récit de Pentecôte, si je devais le mettre en image, ben ce serait comme un baptême…

– Un baptême du feu ! Ou plutôt, un baptême DE feu ! Allez, on ose ! On compare la Pentecôte au baptême : la Pentecôte est signe de la grâce de Dieu, de son amour, et le baptême l’est aussi ! – Si le baptême est la manifestation de l’engagement du croyant dans la vie chrétienne, y a t’il un plus bel exemple d’engagement que celui des apôtres remplis de l’Esprit saint qui se lèvent pour témoigner ?

– Et si le baptême est un sacrement qui signifie l’entrée dans l’Église du Christ, bingo !

La Pentecôte qui suit l’ascension de Jésus-Christ ne marque t’elle pas les débuts de l’Église chrétienne ?

– Dis-donc, ta Pentecôte, c’est un peu comme un moteur de voiture, un moteur à explosion, un feu de Dieu  qui nous fait démarrer, qui nous met en route. De plus, le feu de la Pentecôte, Luc nous le présente comme des langues pareilles à des flammes de feu qui se séparent… Ça devient un démarrage à la fois individuel et collectif ! … Ou collectif et individuel, si l’on préfère . C’est comme on veut…

– Oui, une vraie mise en route. Et dans cette Pentecôte comme dans le sacrement du baptême, chacun est important aux yeux de Dieu, chacun reçoit le baptême, personnellement : il ne s’agit pas de baptiser en masse avec un tuyau d’arrosage, mais au contraire, le geste, le symbole, les paroles liturgiques sont offerts à chacun et chacune, personnellement. Et dans cette Pentecôte, chacun reçoit le feu, chacun reçoit l’Esprit saint. Chaque croyant fait partie d’un tout, et chaque croyant est comme un tout, par la foi !

– Et ce d’autant plus que le texte insiste en disant : « Ils furent tous remplis de l’Esprit Saint ! ». Ils n’ont pas reçu une portion proportionnelle, tel un peu, l’autre beaucoup, tel en fonction de ses mérites, tel en fonction de ses péchés, en fonction de sa taille ou de son poids, non ! Tous ils sont remplis de l’Esprit saint ! Ça c’est l’économie selon Dieu ! C’est sa justice : ils ont besoin de l’Esprit saint, eh bien ils le reçoivent jusqu’à en être tous remplis !

– Waow ! J’aime bien cette idée. D’ailleurs, c’est plus qu’une idée, hein ! Je veux dire…. Enfin, ça fait bizarre de le dire mais, c’est une expérience formidable de se sentir rempli par l’Esprit ? Ça ne m’arrive certainement pas tous les jours, mais ça m’est arrivé…. Et ça fait drôlement du bien ! Mais cela dit, moi, mon expérience personnelle de Dieu, c’est plutôt dans le murmure dont tu parlais au début, avec Elie, que dans les grands fracas.

– Le monde entier ne nous montre t’il pas qu’il y a de la place pour plusieurs types d’expériences de Dieu ?!?

– C’est peut-être pour cela que les images bibliques pour parler de l’Esprit empruntent à trois éléments : le Souffle, donc l’Air, puis l’Eau, et le Feu. Tous nécessaires pour venir dynamiser notre bonne vieille nature humaine, qui à l’origine est plutôt faite de terre, de glaise collante et lourde !…

– Toi, tu vas encore nous sortir un verset de la Genèse !

– Non, ça ira…. Mais ce qui m’émerveille dans la Bible, c’est cette façon tellement riche, poétique et profonde que ses auteurs ont de dire leur expérience de Dieu. Nous aujourd’hui, il me semble qu’on se prend toujours les pieds dans la langue, on se trébuche sur nos mots… Et, malheureusement, notre langue ne me semble plus assez de feu ! Ça me fait penser à un philosophe, tiens, Bruno Latour, qui disait que le croyant a « comme un bœuf sur la langue » pour parler de sa foi dans le monde contemporain… Et qu’est-ce que sa pèse, un bœuf, alors qu’on voudrait tellement être léger et délié comme les apôtres aux premiers temps !

– Drôle d’expression, ce bœuf sur la langue ! Il parait que dans l’Antiquité, avoir un bœuf sur la langue, cela signifiait accepter de l’argent en échange d’un silence discret ! Nous laissons-nous acheter, et par qui ? Qu’est-ce qu’on nous donne, pour taire les merveilles de Dieu ? Ou pire, peut-être que nous sommes devenus tellement frileux, presque honteux de croire au milieu de tous ces fondamentalismes, qu’il n’y a même pas besoin de nous acheter pour que nous nous taisions ? Aïe, notre réflexion prend un tour trop pessimiste, et pas très constructif !

– Allez, restons positives ! Du témoignage, il y en a. Mais par rapport à cette Pentecôte décrite dans le livre des Actes, de quoi faut-il témoigner aujourd’hui ? Et comment ? Faut-il matraquer nos contemporains avec les Lois de Dieu ?

– Ou y aller avec les dogmes de l’Église, haha ! c’est du costaud ça, les dogmes !?!

– Parler en langues et compter sur les interprètes… ?

– Ou élaguer les traductions pour n’avoir plus qu’une Bible simplifiée à l’extrême ?

– Ou la traduire entièrement en langage SMS !

– Est-il vraiment là, le défi du témoignage ? Les apôtres ne se sont pas posé tant de questions. Mais ayant côtoyé Jésus et vécu la Pentecôte, ils ont peut-être eut plus facile ?!? -Mh. Déjà, pour décrire la Pentecôte et l’Esprit saint, Luc fait appel aux comparaisons pour tenter de décrire quelque chose d’indescriptible : un bruit comme un grand vent, les langues pareilles à des flammes de feu… Nous sommes face au même challenge : décrire l’indescriptible !

– Ou alors le vivre. N’est-ce pas à cela que nous sommes appelés, dans le protestantisme ? Être des témoins, et donc témoigner de la présence de Dieu dans nos vies par notre manière d’être…

– Est-ce qu’on oserait se savoir rempli de l’Esprit saint, s’accepter rempli d’Esprit saint… ? Et si on essayait pour voir ? Et si, cette semaine au moins, pour commencer

– Ouaih, pour commencer !

– …et puis aussi plus tard peut-être, si on essayait de prendre conscience du fait que nous sommes remplis d’Esprit saint… Si on essayait d’accepter cette idée…

– Peut-être en lien avec notre baptême aussi ? Mais peut-être pas exclusivement… ?

– Oui, pourquoi pas !?! Et puis tâchons de regarder les autres comme étant eux aussi remplis d’Esprit saint… Accueillons-les comme tels.

Faisons cette expérience, cette expérience de Dieu. Qu’elle puisse re-susciter en nous le feu de notre baptême, le feu de la Pentecôte, aussi souvent que possible, chaque jour que Dieu nous donne, chacun pour notre part, et en communion avec les chrétiens de tous temps et de tous lieux !

– Oui, Amen

 

Seraing-centre et Verviers Hodimont

 

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Image : pixabay

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