Dans la nuit, cette nuit, je sais que tu te tais, mon Dieu.
On t’en voudrait parfois, on voudrait que tu parles,
et certains même voudraient que tu tonnes,
et que tu dises dans les fracas une Loi inexorable, Volonté de fer,
et déjà les médias regorgent de ceux qui te font parler à leur place
comme si tu disais : ce fléau que je vous envoie vous punira de vos égarements.
Mais tu n’as rien envoyé, ce virus n’est pas ton œuvre,
et tu le regardes comme nous, tremblant de voir la Mort avancer.
Voici : ce n’est pas parce que tu as vaincu la mort que tu n’entends pas nos souffrances.
Et tu sais que le grain de blé frissonne à l’heure d’être en terre
et tu sais nos peurs de tomber, notre solitude,
et la déchirure de nos cœurs aimants.
Dans la nuit, cette nuit,
après la longue journée de ce silence étrange, dehors,
sans voitures ou presque
où l’on entend les oiseaux et les sirènes d’ambulance
briser l’absence ;
dans la nuit, cette nuit, le silence.
Dans la nuit, cette nuit,
après la longue journée des bruissements médiatiques
l’agitation quotidienne des médias
leurs statistiques et leurs nombres de morts
leurs querelles,
dans la nuit, cette nuit, le silence.
Dans la nuit, cette nuit,
Toi qui ne compte pas les morts mais entend chaque douleur
comme tu sais chaque étoile tombée trop tôt du ciel.
Toi qui accompagne chaque mort et chaque deuil vécu en solitude
chaque famille qui ne peut entourer son défunt
et jusqu’à la famille d’une enfant !
Dans la nuit, cette nuit,
où chaque mot que je cherche n’est que bavardage
où chaque prière que je murmure n’est que vanité
Toi, Dieu de tendresse
tu es là près de nous,
tu trembles avec nous,
dans une infinie compassion,
et si tu te tais,
dans la nuit, cette nuit,
c’est que tu pleures avec nous,
et le silence est mouillé
du Sel de tes larmes qui tombent en terre
avec nous.
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