En 2020, l’antisémitisme pendant le carnaval d’Alost atteint un nouveau seuil critique

En 2020, l’antisémitisme pendant le carnaval d’Alost atteint un nouveau seuil critique.

Depuis la mi-mars, le coronavirus Covid-19 capte toute notre attention. Des images inquiétantes et époustouflantes venant des hôpitaux en Chine, en Italie et en Espagne nous montrent les efforts extraordinaires que le personnel médical met en œuvre, souvent dans des conditions difficiles, pour sauver la vie des grands malades.

Mais, malgré cela, je voudrais quand même revenir quelques instants sur le carnaval d’Alost du mois de février dernier. Le coronavirus Covid-19 l’a repoussé à l’arrière-plan de l’actualité, mais nous devons tirer quelques leçons de cet événement pour l’avenir.

Lors de la fête du carnaval d’Alost en 2019, un char décoré transportait des représentations stéréotypées des Juifs, véhiculant ainsi un message antisémite. Une enquête menée par l’UNIA a permis de conclure que l’intention des auteurs du carnaval n’était pas antisémite, car ils ignoraient que d’identiques représentations antisémites étaient utilisées par le régime Nazi. « Wir haben es nicht gewusst » se faisait ici aussi entendre. Nous espérons que le Ministre de l’enseignement fera inscrire dans le programme de l’enseignement secondaire des cours relatifs aux causes et aux conséquences des régimes totalitaires (le Nazisme, le Stalinisme, le Maoïsme etc.)

Avec le cortège du carnaval en 2020, les auteurs ont fait un pas de plus. On pouvait y trouver, non seulement, des représentations stéréotypées des Juifs, mais en plus, les Juifs y étaient représentés comme des fourmis. Les auteurs du carnaval expliquaient qu’il s’agissait d’un jeu de mot : le mot ‘klaagmuur’ (Mur des lamentations) se dit dans le dialecte d’Alost ‘klaagmier’ (fourmi qui se lamente). Les Juifs représentés comme des insectes est une humiliation qui n’a plus rien à voir avec un carnaval : ceci est de l’antisémitisme pur et dur. Impossible maintenant de s’exclamer que l’on n’était pas au courant « wir haben es nicht gewusst » ! Ceci était une attaque consciente envers nos concitoyens juifs, avec à nouveau une référence au régime Nazi. Dans ce régime, les Juifs étaient présentés comme des araignées éveillant ainsi le phantasme qu’ils tiendraient le monde dans leur pouvoir comme une araignée tisse sa toile. La représentation des Juifs comme des insectes est clairement ‘une banalisation du mal’, pour reprendre les mots de Hannah Arendt (Eichmann à Jérusalem : Rapport sur la Banalité du mal). Le Nazisme avec ses conséquences sont ici banalisés. Nous pensons que seule la seule juste réponse est une action judicaire contre les auteurs du carnaval.

Nous suivons avec inquiétude la résurgence de l’antisémitisme, qui en vérité n’a jamais disparu. Dans son ouvrage Antisemitism, here and now (« L’antisémitisme, ici et maintenant ») la Professeure Deborah Lipstadt montre que l’existence de l’antisémitisme dans une société manifeste un malaise dans la société toute entière. Il est grand temps de d’agir activement contre ce phénomène difficile à déraciner.

Mais il convient de regarder au-delà de l’antisémitisme. Nous nous efforçons de construire une société inclusive et multiculturelle basée sur la tolérance envers toutes et tous, indépendamment des considérations relatives à la religion, du genre, de l’âge, de la race ou de l’orientation sexuelle. Nous devons éviter des stéréotypes blessants qui humilient l’autre. Respectons-nous les uns les autres ! Certes, nous pouvons rire, mais en respectant une limite : celle de la dignité de la personne humaine. Nous ne pouvons pas tolérer que cette limite soit franchie.

Ds. Harry Sinnaghel – Président de l’O.C.J.B.
Organe de Consultation entre Chrétiens et Juifs en Belgique
Overlegorgaan van Christenen en Joden in België
Het O.C.J.B. is lid van het I.C.C.J. – l’O.C.J.B. est membre de l’I.C.C.J.

 

mars 2020

 

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