Le temps de la théologie verte

Les inondations et les incendies de forêt confrontent les cultes à une réalité devant laquelle ils ne peuvent plus fermer les yeux. Lors de la rencontre interreligieuse des femmes « Les Amies Pieuses », le 11 août à Alost, le livre Groene Theologie (Théologie verte) de Trees van Montfoort a servi de point de départ pour proposer un nouvel iconoclasme. Pour la pasteure Saskia Ketelaar “Nous devons apprendre à penser différemment l’image de Dieu, l’image de l’homme et l’image du monde. C’est notre grand chantier”.

Par Kelly Keasberry

 

La pasteure néerlandaise Trees van Montfoort démontre que la chaire se prête parfaitement à une Parole sur la nature dans Groene Theologie – choisi comme livre théologique de l’année 2019 par les critiques du journal Trouw et Nederlands (Confiance et Pays-Bas). C’est en préparant la réunion des Amies Pieuses que Saskia Ketelaar a décidé de s’y plonger. Elle a été saisie par la puissance prophétique du livre, paru à peine six mois avant le déclenchement de la pandémie.

“J’étais en train de lire ce livre, lorsque les eaux ont dévasté des régions entières en Wallonie, en Allemagne et aux Pays-Bas”, témoigne S.Ketelaar. Le feu, quant à lui, a fait des ravages sur le pourtour méditerranéen. Dans ce contexte, les Nations Unies ont publié un rapport climatique catastrophique du GIEC, qui montre que le réchauffement climatique est plus rapide, plus étendu et plus intense que prévu. Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, qualifie le rapport de “code rouge pour l’humanité”. Nous devons donc agir rapidement. “Chaque dixième de degré fait déjà une différence”, affirment deux coauteurs belges du rapport.

 

L’angle mort

Selon l’historien Lynn White, le christianisme occidental est largement responsable de la crise climatique. L’intendance confiée à l’Humanité dans la Genèse – 1,28 a souvent été lue de manière anthropocentrique. Cela a contribué à une vision du monde dans laquelle l’être humain – en particulier l’homme occidental et blanc – se considère comme la mesure de toutes choses et, dans sa quête de pouvoir et de profit, croit pouvoir tout contrôler. “Comment peut-on acheter ou vendre l’air, la chaleur de la terre, la course de l’antilope ?”, se demandait à juste titre un chef indien à Seattle.

A l’anthropocentrisme qui a coloré nos exégèses, T. Van Montfoort oppose une théologie écologique. La cohésion en est le point de départ. Selon la théologienne, la Création n’est pas un événement unique dans le temps qui se limite à la Genèse, mais un processus continu qui imprègne tous les livres de la Bible. Rien n’est jamais terminé. Cela fait de la Bible un livre non pas anthropocentrique, mais théocentrique. Le rôle de Dieu et son plan de Salut pour la Terre sont centraux. Et le cosmos est bien plus que la toile de fond sur laquelle se déroule cette histoire du Salut. “Dieu regarda tout ce qu’il avait fait et vit que cela était bon”, lit-on dans la Genèse – 1, 31. La Création est intrinsèquement bonne, car elle reflète la grandeur de Dieu et en témoigne sans cesse.

 

 

 

 

 

Péché et culpabilité

La crise écologique est une crise de notre vision du monde et de notre relation avec Dieu et la terre. Le système économique actuel présente deux défauts cruciaux : d’une part l’être humain qui se considère comme la mesure de toutes choses, et d’autre part un manque de responsabilité vis-à-vis de la Terre. Mais si – comme le dit Greta Thunberg – notre maison est en feu, tout le monde n’est pas favorable à un sujet comme le climat.

La raison en est évidente. L’histoire du climat est souvent accompagnée de scénarios catastrophistes, de messages de péché et de culpabilité et de mesures restrictives. Aussi justifié que cela puisse être, l’accent est trop mis sur le négatif. Si l’on sait que 70 % des gens ne souhaitent rien de plus qu’une vie confortable, il n’est pas étonnant qu’un tel discours ne fasse pas bouger grand monde.

T. Van Montfoort ne tombe pas dans ce piège. Au fil des pages, on découvre un message d’espoir. Toute crise est une opportunité, et même dans le plus grand chaos, la théologienne voit les possibilités d’une nouvelle Création.

 

Réforme verte

Toutefois, cela ne signifie pas que nous pouvons continuer comme si de rien n’était. “Il est temps pour un nouvel iconoclasme, une Réforme verte”, affirme S.Ketelaar, “il est temps de démolir les images de l’anthropocentrisme et de la surconsommation et de les remplacer par d’autres images.” C’est maintenant à l’Homme, qui s’est toujours considéré comme la couronne de la Création, d’enlever humblement sa couronne. Si nous sommes prêts à embrasser une théologie écologique, un espace sera alors disponible pour donner un nouveau sens aux textes bibliques.

La Réforme verte qui nous attend est au moins porteuse d’espoir. Contrairement à l’iconoclasme du XVI siècle, il s’agit d’une lutte à laquelle nous pouvons répondre de manière œcuménique et en toute unité. Le pape François a publié en 2015l’encyclique Laudato Si dans laquelle il fait référence à la Terre comme à “notre maison commune”. En Flandre, Ecokerk met ce document à portée de discussion et le rend stimulant grâce à un programme en sept étapes. La conférence de la politicienne écologiste Fatma Yildiz lors de la réunion des Amies Pieuses montre que la théologie verte parle également aux musulmans.

 

Action de grâce et fête des récoltes

Quels sont les devoirs des protestants ? Comment pouvons-nous utiliser nos traditions spécifiques pour concrétiser une autre façon de penser à Dieu, à l’être humain et à la Terre ? T.Van Montfoort donne différents conseils dans son livre, dans lequel elle plaide pour une restauration de la tradition de l’Action de grâce et des jours de moisson. Un service d’action de grâce pour la récolte peut être caractérisé par le respect de la Terre, de tout ce qui pousse.

 

Église bien-aimée, il est temps de faire un mea culpa. Les théologiens, qui ont longtemps prêché une culture anthropocentrique, sont aujourd’hui appelés de manière impérieuse à se lever et à prendre leurs responsabilités. Il est temps de procéder à une Réforme verte. Joignons nos mains et détruisons les anciennes idoles. Et retournons avec gratitude vers l’Éternel, afin que la Création redevienne une source de vie pour de nombreuses générations.

 

Lien utile :

https://fr.protestant.link/1-changement-climatique/

Images :

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