Article paru en février 2013 republié dans le Mosaïque de décembre 2016.
Notre époque est placée sous le signe de la communication et est balisée de messages sonores censés attirer notre attention, par ailleurs déjà très sollicitée par les publicités, les débats politiques et les chansons tronquées, car il faut aller toujours plus vite pour maintenir l’intérêt des auditeurs. Le bruissement de toutes ces paroles nous donne le tournis ! Que croire ? À qui faire confi ance ? Comment démêler le vrai du faux ? En même temps, nous constatons que beaucoup d’entre nous ont l’impression de ne pas être écoutés, ni entendus. D’ailleurs, pour pallier ce manque, des personnes se sont formées à l’écoute et des mouvements d’écoutants ont été créés. S’il suffi t d’être deux pour communiquer, il n’est pas si facile que cela d’écouter effi cacement ! La Bible présente Dieu comme le Dieu-Parole qui parle et appelle à l’écoute ; mais la relation ne se vit pas à sens unique : les humains s’adressent à lui, l’interpellent, le prient d’entendre leurs attentes, comme l’expriment les auteurs des Psaumes ou du livre de Job, par exemple. Écouter dans l’Ancien Testament Les 2 verbes hébreux employés pour désigner l’écoute sont « azan » et « shama ». « Azan » signifi e « écouter, entendre » mais aussi « prê- ter l’oreille et ouvrir l’oreille ». Son usage est surtout poétique.
« Shama » est le verbe le plus utilisé, près de 1100 fois dans l’Ancien Testament !, : il signifi e « entendre » mais en fonction du contexte, il est traduit par « entendre, – écouter, – obéir, – mettre en pratique, – comprendre, – exaucer, – apprendre » Un des passages célèbres où apparaît Shama est le texte central de la foi juive, connu sous l’appellation « Shema Ishraël » (Écoute Israël)1 , sorte de condensé de la Torah, inaugurant les prières quotidiennes juives pour replacer toutes les activités du croyant dans l’ouverture à une parole extérieure. Cette « confession de foi » n’incite pas à la passivité mais invite à une écoute attentive qui entraîne l’engagement de la personne et qui se laisse guider par la confi ance en Dieu, seul Seigneur de la vie. Mais Dieu ne se contente pas de parler et les Psaumes, Job ou certains prophètes l’implorent avec insistance de les écouter et parfois même, ils ne se gênent pas pour se plaindre de la lenteur apportée à sa réponse. La fi n du livre de Job nous apprend que l’on peut parler à Dieu, lui soumettre nos peines, mais qu’il faut aussi savoir se taire et se mettre à l’écoute de celui qui nous aime et nous offre jour après jour sa Grâce. Ainsi, on peut discerner, dans les textes bibliques, un dialogue entre Dieu et l’humanité, dans lequel l’écoute et la parole revêtent la même importance. « Que celui qui a des oreilles pour entendre, qu’il entende ! »2 La Bible est parcourue des premiers textes jusqu’aux évangiles et à l’Apocalypse, par une injonction que nous connaissons bien et que Jésus prononce après avoir raconté la parabole du Semeur et des différents terrains « Que celui qui a des oreilles pour entendre, qu’il entende ! » Écouter dans le Nouveau Testament Nous en arrivons alors à la notion d’écoute telle que l’expriment les rédacteurs du Nouveau Testament, au moyen du verbe grec akouô pour signifi er l’action d’entendre ou d’écouter, mais aussi « apprendre, exaucer, comprendre, obéir… » . Ce verbe apparaît à de nombreuses reprises dans la bouche de Jésus, notamment chaque fois qu’il appelle les foules à recevoir son enseignement. Bien entendu, il ne suffi t pas simplement de l’entendre mais il faut aussi le comprendre et l’appliquer. Au travers de ce large éventail de signifi cations, le verbe akouô, induit une dynamique qui part d’entendre (de façon diffuse), passe par écouter (de manière plus précise), ensuite par comprendre (intérioriser) et aboutit enfi n à mettre en pratique (donc s’approprier). En outre, l’étymologie de ce verbe nous révèle que l’écoute doit se faire avec acuité et discernement pour bien choisir entre les messages perçus.3 Ce trop bref parcours biblique nous interpelle en tout cas sur notre façon d’écouter l’autre, le monde, nous-mêmes et l’Autre. Avec quelle qualité d’attention et quel discernement pour faire la part de ce qui vient réellement de nous, de l’autre et de Dieu ? À poursuivre…
Michèle Browet-Duquène
Ecoute Israël, le Seigneur, notre Dieu, le Seigneur est Un. Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de toute ta force. Ces paroles que j’institue pour toi aujourd’hui seront sur ton cœur. … »