Pasteure en hôpital et en maison de repos à l’heure du corona-virus

Entretien avec la pasteure Tünde Boelens, aumônier en hôpital et maison de repos

Comme dans tout hôpital, je ne peux entrer que par un chemin balisé et avec une autorisation appropriée, un masque sur le visage et les mains désinfectées. J’ai rendez-vous avec Tünde Boelens, la seule pasteure protestante d’hôpital et de maison de repos exerçant une activité rémunérée en Flandre. Tünde travaille depuis onze ans pour le ZiekenhuisNetwerk Antwerpen (ZNA) et le Zorgbedrijf (ZB), le réseau des centres de soins résidentiels. Au total, quelques 28 maisons de soins ! Toute personne admise dans un hôpital ou un centre de soins résidentiels peut demander l’assistance pastorale de son choix. Tünde rend visite aux membres de l’Eglise, en plus de l’aumônerie communautaire, mais aussi et surtout à de nombreux demandeurs. Elle est membre du département de réflexion sur la vie, où travaillent aussi des prêtres catholiques et des conseillers moraux libéraux.

 

Tünde, comment vis-tu ton travail ?

Je suis tellement reconnaissante d’être autorisée à faire cela. J’ai l’impression d’être appelé par Dieu. Pour moi, c’est comme d’être ammenée vers les gens et j’ai déjà vécu énormément de belles choses. La prière commune est un moment sacré. Mais j’ai aussi beaucoup de conversations ordinaires et je remarque que c’est une bénédiction de pouvoir donner aux gens une oreille attentive et des encouragements.

 

Peux-tu encore travailler en cette période de corona-virus ? As-tu des contacts avec les patients qui sont contaminées ?

Non, nous ne sommes pas autorisés à rendre visite aux personnes contaminées ; cette interdiction s’applique à tout le monde. Nous ne sommes autorisés que dans quelques maisons de repos, avec les précautions nécessaires. Le but est évidemment de prévenir une nouvelle propagation. Cependant, nous sommes autorisés à aider les familles à dire au revoir.

Dans les salles ordinaires, j’ai le droit de venir et le besoin de parler est grand. Je constate que les patients non atteints de coronaropathie ont maintenant besoin d’un soutien supplémentaire. Il y a beaucoup de solitude et d’incertitude, beaucoup de peur aussi. En psychiatrie, je viens chaque semaine, je constate aussi que les besoins psychologiques ont augmenté.

 

Tu n’as pas peur d’être infecté ? Comment faire face à la misère engendrée par le corona-virus ?

Au début, il s’agissait de savoir comment y faire face. Comme beaucoup d’aidants, nous nous sommes tous arrêtés au début, puis nous nous sommes progressivement remis sur la bonne voie en cherchant des moyens d’être en sécurité. La peur du début s’est transformée en amour et en compassion pour les patients. Et aussi avec le personnel, qui fait de gros efforts.

Nos journées sont bien remplies. Les réunions sur écran d’ordinateur ne sont pas vraiment agréables. Mais ce qui est particulièrement difficile, c’est l’impuissance. C’est terrible de connaître tant de besoins et de ne pas pouvoir entrer chez les gens. Je constate que les contacts avec les personnes que j’ai le droit de visiter, en particulier dans les maisons de retraite, s’approfondissent. L’autre jour, une dame m’a dit : “Je prie encore”…

Ce furent des semaines et des mois intensifs. Les personnes que j’ai accompagnées dans les maisons de repos se sont retrouvées dans les hôpitaux que je visitais, certaines d’entre elles sont mortes. C’est une perte à chaque fois. Je me console en pensant qu’après une vie bien remplie, chacun d’entre eux aspire à aller vers le Seigneur.

Pour moi, ce qui vient en premier, c’est la gratitude pour les conseils de Dieu. Beaucoup de belles choses se passent en ce moment. Il y a un homme que je suis depuis des années, qui n’a pas eu de contact avec la foi pendant longtemps, mais qui m’a demandé mon assistance pastorale il y a deux ans. J’ai pu l’accompagner jusqu’au dernier moment (ce n’était pas le corona) et il s’est confié à Jésus. C’est pour cela que je le fais : pour mettre les gens en contact avec l’amour de Dieu, et s’ils s’y ouvrent, c’est la plus belle chose qui soit : revenir à la maison de Dieu et trouver la paix et le bonheur par le Seigneur.

Je tiens également à remercier tout particulièrement Marian Knetemann, de la Société biblique flamande, qui me fournit efficacement les livres bibliques dont j’ai besoin. Elle offre ainsi un soutien important à notre travail en faveur de la population.

Un grand merci également à tous les ministres du cultre d’Anvers et d’ailleurs qui proposent des services religieux en ligne. Après une semaine intense, je peux me recharger spirituellement à chaque fois pour pouvoir continuer.

 

Merci pour cette conversation inspirante, Tünde.

Tout le plaisir est pour moi.

 

Propos recueillis par la Pasteure Petra Schipper

 

 

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