Le Conseil œcuménique des Églises, c’est 4 000 délégués et un programme chargé qui génère en nous de multiples impressions. Dans cet article, nous allons vous faire part de ce qui nous vient à l’esprit après les premiers jours intensifs de l’Assemblée.

« Nous avons reçu des salutations de nombreuses confessions et philosophies, du pape à l’évêque de l’église catholique syro-malabare. Mais c’est probablement la professeure Azza Karam, secrétaire générale de Religions for Peace et musulmane, qui a fait la plus grande impression » explique le président Steven H. Fuite.

Elle a confessé sa foi de la manière suivante : “Je crois de tout mon cœur qu’en tant que femme musulmane, l’amour du Christ m’est aussi destiné. »

Lorsque qu’elle a parlé du thème central : “l’amour du Christ amène le monde à la réconciliation et à l’unité.”, elle était émue et la moitié de la salle, y compris moi, a été profondément émus. Sa déclaration avait une telle dimension universelle qu’elle m’a bouleversé. Comme il est écrit en Éphésiens 3:18-19 « vous serez ainsi à même de comprendre, avec tous ceux qui font partie du peuple saint, combien l’amour de Christ est large, long, élevé et profond. Oui, vous serez à même de connaître cet amour qui surpasse tout ce qu’on peut en connaître, et vous serez ainsi remplis de toute la plénitude de Dieu.”

J’ai expérimenté ces mots de l’intérieur, comme entouré de l’amour du Christ.

La professeure Karam nous appelle à nous rassembler comme un seul homme à la suite de la résurrection du Christ et à nous servir les uns les autres. Nous sommes appelés à ne pas nous laissés utiliser par les politiciens et par l’establishment politique. Au contraire, nous devons être la conscience du monde politique.

Déçus et ravis

Cela nous conduit directement à ce que nous pouvons décrire comme une grande tension sous-jacente à la conférence. Il y a eu des discours plus impressionnants, mais certains responsables d’Église osent à peine nommer les sujets source de tension et semblent fuir dans un langage abstrait.

Pourquoi ? Peut-être ont-ils peur. Peut-être ne veulent-ils déranger personne ? Je le regrette profondément et j’en suis un peu fâché. Nous avons l’impression d’avoir manqué des occasions. Être trop diplomate ne mène à rien. Ce n’est rien d’autre que de mettre en terre son seul Talent au lieu de le faire fructifier, et d’espérer que les choses se résolvent d’elles-mêmes. Ce n’est pas ainsi que travaille le Seigneur de l’Église, a fortiori ses serviteurs.

« Je préfère de loin être face à quelqu’un qui va au bout de ses idées, qui parle avec le langage du cœur, qui parle avec passion et qui, de temps en temps, dérape, mais qui au moins fait bouger les choses, exprime ses pensées et ses sentiments et vous fait réfléchir. » témoigne le président Steven H. Fuite.

C’est le cas du président fédéral d’Allemagne, Frank-Walter Steinmeier, qui dans un discours pein de sincèrité et de fougue, a abordé les deux grands sujets douloureux : l’antisémitisme et la guerre en Ukraine. « Cela m’a touché, dit Eleonora, de voir Steinmeier condamner toutes les formes d’antisémitisme et vouloir les étouffer dans l’œuf. Cela témoigne qu’il est possible de travailler à une vraie repentance et d’affronter l’histoire. Et c’est l’assurance qu’au plus haut niveau, en Allemagne, l’antisémitisme en tant qu’idéologie de destruction est toujours vigoureusement combattu.

Steinmeier a soutenu fermement l’Ukraine : “Nous devons nous élever contre la guerre et, en tant que communauté chrétienne, défendre la dignité et la liberté des Ukrainiens. La propagande et le nationalisme russes vont à l’encontre de la liberté des autres. Les délégués de l’Église orthodoxe russe doivent être informés de la vérité sur cette guerre horrible : c’est ce que j’attends de cette Assemblée. La construction de ponts nécessite de la bonne volonté de la part des deux parties et elle n’est pas possible si l’une d’entre elles détruit les piliers du pont.” Steinmeier s’est exprimé non seulement en tant que politicien, mais aussi explicitement en tant que chrétien : “Celui qui demande le pain quotidien dans sa prière au Seigneur a le droit (le devoir ?) de se battre pour que chacun ait assez à manger et puisse vivre décemment.” En d’autres termes, “Le royaume de Dieu n’est pas indifférent aux prix du commerce mondial.”

Rencontres de personne à personne

Le Conseil mondial n’a guère qu’un pouvoir de déclaration et de proposition. Il ne décide pas grand-chose, il est trop massif, trop lourd, trop chargé de politiques d’églises, entremêlées en outre à des intérêts politiques nationaux qui éclipsent l’international. Et le droit de veto s’applique.

Cela n’enlève rien au fait que suivre le conseil est extrêmement fascinant et instructif.

Enfin, les rencontres spontanées, les évènements fortuits en marge du programme officiel, ont une valeur inestimable. Eleonora raconte par exemple que « sur le chemin de la gare à l’hôtel, un délégué coréen m’a dit qu’il avait consacré sa vie à la réunification des deux Corées. Ou encore la ministre sâme de Finlande qui a montré des photos impressionnantes de la réinhumation de ses ancêtres dont les ossements avaient été utilisés sans autorisation pour la recherche scientifique et qui pouvaient enfin être enterrés dignement. J’ai également parlé dans le métro avec un responsable d’église qui a créé des “églises post-migrants” en Allemagne pour les migrants de deuxième et troisième génération qui ne trouvent pas de place dans les églises traditionnelles de migrants mais qui ont également des difficultés à s’intégrer dans les églises historiques ».

L’autre grand thème de cette conférence, la crise climatique, est également en pleine ébullition. Nous vous en reparlerons dans le prochain article.

Pasteure Eleonora Hof & Pasteur Steven H. Fuite